[le site de Fabienne Swiatly ]

C'est l'ecchymose, douleur qui s'efface.

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Me voilà à Givors, au bord du Rhône pour une petite résidence d'un mois. Hier, rejoignant mon hôtel après un atelier avec des adultes, vers 22 heures, je longeais le Rhône  au bord duquel la ville s'est construite. Le fleuve était lourd d'eaux de pluie. Il s'enfuyait vers le sud, totalement indifférent aux rives et à la barge qu'il contournait avec force et remous. Je suis restée un long moment à le regarder et je lui ai parlé. J'ai renoué une converstation ancienne avec beaucoup d'émotion. J'ai vécu 25 ans sur une péniche à Lyon. Et ce que j'aimais le plus était m'asseoir dans la cuisine, la nuit, lumières éteintes et regarder le fleuve suivre son tracé. Un fleuve changeant et puissant. Il y a trois ans, nous avons vendu le bateau, depuis j'ai évité le fleuve. Hier soir, c'était la première fois que je renouais un lien. L'émotion que j'ai ressentie est celle de l'exilé qui longtemps enferme le pays quitté dans sa mémoire pour ne pas s'effronder. Souvent j'ai écrit que j'aimais les fleuves parce qu'il sont à la fois ici et là-bas. J'ai cherché une photo dans les archives de mon ordinateur, je n'ai trouvé que celle-ci, prise il y a deux ans dans le delta de Camargue (les autres sont sur le disque dur resté à Lyon). Le petit Rhône qui s'enfonce dans les roseaux et ne ressemble en rien au fleuve qui traverse mes souvenirs, chariant à cette époque beaucoup de bois et de boue. Bientôt, à la fonte des neiges, il sera si impétueux qu'il empêchera ses affluents de le rejoindre, alors les crues viendront rappeler aux riverains qu'il est maître chez lui. Oui, il m'a manqué. A Givors existe une maison du Rhône. Je le sais depuis longtemps mais j'en ai pris conscience seulement hier soir. C'est la fin d'un deuil, il me semble. Le fleuve a continué  à être ici et là-bas, et moi j'étais où ?

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20 heures d'atelier d'écriture avec une classe de 3ème insertion professionnelle au lycée Casanova de Givors où je suis en petite résidence jusqu'au 15 février. Des élèves qui seront tous orientés en classe professionnelle l'an prochain. Pour parler de l'atelier, ils utilisent une expression que j'aime beaucoup : faire écrivain. L'atelier est très sympa,  même s'il faut lutter parfois contre le ventre mou du groupe. La posture du strict minimum où répondre à la consigne serait le seul enjeu : ben quoi, j'ai écrit.  Alors je me démène, presque physiquement, pour qu'ils investissent l'écriture. Qu'ils en fassent leur objet, alors qu'écrire quelques lignes, c'est déjà beaucoup pour certains. Avec ce groupe, j'ai été dépositaire de nombreuses confidences. Leurs vies déjà traversées par bien des problèmes : décès des parents, abandon, placement en foyer, et leur corps qu'ils mettent, à quinze ans, dangereusement à l'épreuve avec des cachets, de l'alcool ou des lames de couteau. Et je les invite à transcender leur histoire par l'écriture. Et des moments forts comme avec ce court texte de Dalila dont le parti pris est très fort et singulier  :

"Le bar… un endroit de recueil pour les enfants de la culpabilité, de l’angoisse et de la déprime. Un endroit de péché mais de plaisir. Un endroit qui fait peur aux mamas dont les fils y prennent leur petit-déjeuner, leur déjeuner et leur dîner. Un endroit de paix pour les fils dont les mamas s’inquiètent. Les seuls mots qu’on s’attend à entendre lorsqu’on est jamais entré dans ce genre d’endroit, c’est : salopard, connard, sors de mon bar !"

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Des hommes, des femmes, des pays : Turquie, Espagne, Arménie, Russie, Tunisie,  Algérie… autour d’une table. Centre social de Givors, cours de français qui se transforme en atelier. Dire la nouvelle langue qu’il faut apprendre. Dire ce que son corps, sa mémoire, son âme contiennent avec quelques mots à l’étroit du nouveau vocabulaire.

Moi je parle mal le français,
Je rassemble les mots pour faire une phrase.
Je parle un français cassé avec des mots tout cassés.
Ma fille m’apprend.
Il faut parler français pour habiter ici.

Ils savent déjà très bien ce que l'on s'obstine à vouloir leur apprendre. Les désigner comme ignorants pour les rejeter en dehors de nos frontières. Nos vieilles frontières. Ceux qui payent très chers pour venir vivre ici, pour une vie dure, comme ils ont écrit.

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Je termine parfois mes ateliers par une séance de photos. Une manière de conclure. D'illustrer. Ici une image d'une série sur une classe de 3ème. Pas toujours facile de les photographier à cet âge. Jouer avec le groupe. Les uns qui tournent le dos et celui que l'on appelle regarde l'objectif. La photo comme une autre trace de la rencontre. Avec cette classe du lycée Casanova à Givors, un portrait de chacun sur le thème : Fragments de moi parmi les autres. Le moment de la prise me permet de les découvrir différemment. Souvent, je les croise à la table, avec ce que l'écriture dicte à leur posture. Celui-là qui paraissait timide devant la feuille, se tient bien droit devant l'objectif. Celle qui osait parler d'elle avec les mots, se cache derrière ses camarades par peur de l'appareil. Image de soi. J'aimerais les amener à photographier eux aussi. Associer texte et image sans que cela soit gadget. Je  ne sais pas encore faire. J'y arriverai. L'envie (un de mes mots préférés).

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