Caboulotte 8 - Après huit jours d'immersion dans le théâtre de Roanne puis au conservatoire de la même ville (un grand moment de travail et de partage avec mes camarades du projet Refaites) je suis de retour dans mon petit logis. Le paysage a totalement changé, tapis orange et brun au sol, feuillus dénudés et à chaque coup de vent une pluie de feuilles mortes. Subtiles craquements. Il fait frais, soleil vif et terre humide. Les oiseaux chanteurs sont silencieux ou partis ailleurs, reste les plus braillards. Ma gorge se serre autour d'une émotion simple et vitale : Je suis bien ici. Tellement contente d'être là, même si la première nuit fut difficile et qu'il me faut quelques jours pour trouver le bon rythme et me réassurer que oui, ça va écrire. Ouvrir le carnet pour les notes du jour, ouvrir l'ordinateur et travailler sur mon roman Saïd - publication en mars. Relire. Relire encore. Traquer les facilités, traquer les passages paresseux, traquer l'inutile et apprendre à déplier certaines scènes, même si ce texte sera, encore une fois, un court roman. Rêver parfois d'un livre de trois cents pages. D'un vrai livre comme me glissait une parente à qui je venais d'offrir Une Femme allemande. Peut-être le prochain dont le dossier a été nommé : Les Encombrants. Écrire donc. Parfois je m'étonne encore que ma vie soit essentiellement faite de cela : l'écriture. Un autre souvenir s'impose : un copain, après avoir lu mon blog, m'envoya un message lapidaire : Tu te prends pour un écrivain maintenant ? Toujours on se souvient précisément des paroles qui nous font vaciller. Donc je suis une écrivaine qui écrit des textes courts. Quinze années consacrées à cela et sûrement le reste de ma vie. Obstination. Et lire dans Lettres à un jeune auteur de Colum MacCann un passage dont le contenu trivial me sied parfaitement : " Garde ton cul sur la chaise. Ton cul sur la chaise. Ton cul sur la chaise / Et tu la regardes de haut, la page blanche. "