IME. Institut médico-éducatif. Ici l'ambiance est très changeante. Cela me fait penser à l'Islande et son climat instable. C'est Eric Boury, magnifique traducteur d'Arnaldur Indriðason, en autres, qui le premier m'a cité ce proverbe islandais : "Si tu n'aimes pas le temps qu'il fait, attends cinq minutes". Ici aussi, en cinq minutes, tout peut changer : les volcans peuvent se réactiver ou s'apaiser, les silences se laisser traverser par un cri, une injure, un claquement de porte. Une vie pleine de hauts et de bas, d'eaux et de terres noires, de ciels immenses et de déserts lunaires. On ne s'ennuie jamais. On s'adapte. On enlève ou superpose les couches protectrices. Ici, les jeunes viennent se construire un avenir malgré les difficultés de la vie, de leur vie. Et ce sont eux qui m'ont dit et écrit : Ici on n'est pas chez les fous. Non ici on est dans le tumulte de l'adolescence, le battement de cœur de la résilience, le territoire instable des enfances abimées. Ils ont écrit aussi ce qu'ils attendaient : Quitter le château, quitter le flou, retrouver l'amour d'un père, revenir dans le pays lointain des origines, revenir sur les lieux de l'abandon, garder secret l'IME, s'inventer un avenir sans fautes d'orthographe, aimer ses parents malgré, avoir un enfant ... Vivre leur vie. Et moi, je partage quelques moments avec eux. Entre écriture, discussion et photographies. Je traverse leur paysage.